Le périnée, on en parle beaucoup, mais, souvent, on ne sait pas trop de quoi il s’agit. Une étymologie fantaisiste décrit cet espace comme « autour du temple » peri naos. La conscience de cette partie du corps est souvent incertaine, son utilisation erronée. Pourtant, la connaissance du fonctionnement du périnée est indispensable dans de nombreuses pratiques corporelles : yoga, qigong, pilates, chant, arts martiaux, danse… et évidement dans les actes de tous les jours.
Le plancher pelvien
Le périnée est un ensemble de plusieurs couches de muscles en forme de losange qui tapissent (et ferment) le fond du bassin. C’est un hamac accroché au pubis sur l’avant et au coccyx sur l’arrière. Il est limité au sommet par la coupole diaphragmatique, sur ses côtés ainsi qu’à l’avant par les muscles abdominaux et à l’arrière par la colonne vertébrale. Il soutient les organes comme la vessie, l’utérus, les reins et participe à la contraction des sphincters. Le périnée complète le rôle de maintien des muscles abdominaux profonds (les transverses en particulier) pour les intestins et équilibre les pressions abdominales. Et si on lui associe les muscles du dos, il devient un élément fondamental de l’équilibre rachidien.
Chez les femmes, c’est souvent pendant la grossesse et au cours de l’accouchement que le périnée est mis à rude épreuve. Mais, pour l’homme ou la femme, il y a de nombreuses situations de la vie pendant lesquelles il est malmené. La pratique intensive de certains sports peut ainsi engendrer à terme un relâchement des muscles du plancher pelvien.
Un périnée relâché : une source de problèmes !
Les problèmes de tonicité du plancher pelvien (incontinence, fuites urinaires, descente d’organe), touchent principalement les femmes (grossesses multiples, accouchements difficiles, activités physiques inadaptées). Un périnée affaibli ne joue plus son rôle de soutien : les organes s’affaissent sous leur poids. Ils étirent alors les muscles profonds de l’abdomen et les ligaments, provoquant des douleurs des lombes et du bassin. Et si le plancher pelvien d’une femme n’assure plus son rôle de hamac, les organes situés au dessus (vessie, colon et utérus) risquent de descendre. Mais les hommes, tout particulièrement en cas de problème de prostate, sont également concernés par le relâchement du périnée. Ce dernier joue aussi un rôle sur la fonction érectile. Ce n’est donc pas pour rien que l’ensemble périnée/transverses est appelé « Muscles des Ancêtres » par les chinois. Tout cet espace nous renvoie à nos capacités reproductrices, mais aussi à la préservation de notre centre vital le plus profond.
Le relâchement du plancher pelvien participe aussi au relâchement de la sangle abdominale profonde : le ventre ressort. Faire des abdominaux sans contrôle des muscles périnéaux provoque un ventre saillant, bombé et musclé en superficie, c’est-à-dire l’inverse d’un ventre plat recherché !
Éduquer le périnée, c’est donc aussi renforcer la sangle abdominale et les muscles du dos dans notre lutte contre la gravité. Un plancher pelvien tonique favorise enracinement, verticalité, stabilité et d’équilibre. On se sent aussi fort et plein d’énergie que la Terre. Le flux vital circule dans le bassin, dans les jambes et dans toute la colonne vertébrale. Il est donc évident qu’il ne faut pas attendre une raison médicale pour entretenir tout ça !
EHRENFRIED, KINÉSITHÉRAPIE ET PÉRINÉE
Catherine Casini (in CAHIER N°10 AEDE, 2002)
La méthode Ehrenfried, par le travail personnel qu’elle implique, les prises de conscience qu’elle éveille et les résultats qu’elle obtient en la matière, me paraît tout à fait fondamentale.
En effet, les mécanismes de rétroactions qui sont sa base, l’éveil des sensibilités proprioceptives qu’elle induit, se conjuguent pour permettre à la femme d’acquérir tonus et aplomb du plancher périnéal et de garder, voire de retrouver la pleine maîtrise de ses fonctions mictionnelles.
Il peut paraître étonnant qu’une méthode baptisée assez anodinement « gymnastique holistique » puisse avoir de telles conséquences, qui relèvent d’une kinésithérapie médicale de haut niveau.
Mais il convient de ne pas oublier cette admirable intuition d’Elsa Gindler, professeur de Mme Ehrenfried, intuition qui inspire notre approche de l’autre et qui veut que ce que nous faisons soit non pas simple gymnastique mais « travail sur l’Être ». Cela implique une remise en ordre intuitivement perçue et mécaniquement organisée de cet imposant diaphragme qu’est le périnée, support de l’ensemble corporel, véritable hamac berçant et protégeant nos viscères.
Lily Ehrenfried et la gymnastique holistique…
La Gymnastique Holistique du docteur Ehrenfried permet une véritable prise de conscience par l’expérimentation. Toute pratique corporelle, toute activité physique (dont la première est la respiration) dépend de la souplesse et de la tonicité du diaphragme pelvien. Debout, assis ou allongé, les mouvements spécifiques de la Méthode Holistique Ehrenfried permettent un entretien, sans traumatisme, de la tonicité périnéale et abdominale. En évitant toute problématique d’hyperpression, ils permettent de retrouver en douceur une belle harmonie globale.
Lily Ehrenfried, bien avant les remarquables travaux de Bernadette de Gasquet ou de Blandine Calais Germain, a démontré l’importance du périnée dans les nombreux aspects de notre vie quotidienne. Il est essentiel dans le placement du bassin et donc dans notre statique et nos mouvements. Bien avant elle, de nombreuses pratiques corporelles orientales soutiennent la conscience et la stimulation de cette zone corporelle. Les chinois, les japonais, les indiens y placent le socle d’un de nos foyers énergétiques. C’est « l’océan des souffles », « la porte des origines », « le champ de cinabre » des pratiquants de qigong. C’est « la racine » des yogis.
La Gymnastique Holistique nous invite à cheminer patiemment vers une conscience plus précise de nous-même, grâce à un corps mieux équilibré et plus vivant. La gymnastique holistique permet de retrouver plus d’indépendance, de précision gestuelle, d’expressivité. À partir de mobilisations douces, d’étirements, d’auto-massages, c’est une exploration corporelle inter-active, éducative et préventive. Sous la forme d’une gymnastique douce, la méthode Ehrenfried favorise la « tendance organisatrice » du corps, c’est à dire son organisation naturelle, intelligente et harmonieuse. Bien que de nombreuses pratiques corporelles l’utilisent comme démarche transversale pour s’affiner, c’est une méthode complète en elle-même.
…une pédagogie unique pour une méthode d’exception
La méthode Ehrenfried, c’est une pédagogie unique : la description orale, la proposition d’un mouvement simple. Il n’y a personne à copier, pas de modèle parfait : l’animateur ne démontre rien, il suggère un scénario. À partir de cette proposition, chacun recherche le chemin intérieur de sa réalisation. Ainsi, aidé par le rythme de la respiration tout devient facile…
Il ne s’agit pas de trouver le meilleur geste, mais d’observer et d’agir dans la conscience de notre globalité. Des périodes de silence intérieur ponctuent cette recherche d’un mouvement authentique et personnel. L’information acquise se fixe alors dans la mémoire corporelle pendant que la détente active continue son œuvre libératrice. La conscience corporelle s’affine dans le temps plus lent qui est celui du corps. Ce dernier est, petit à petit, libéré, aligné, flexible, tonique…
Dans un monde d’image et de performance, de survitesse et de productivité, voici un travail sur soi en profondeur, sans précipitation, dans le calme et l’attention fine. Il a pour assise la conscience du corps. Il nous amène à découvrir qu’il est possible de faire soi-même quelque chose pour soi, d’améliorer sa situation de vie et de la traverser plus sereinement. En expérimentant des mouvements simples et, surtout, en développant une attitude d’ouverture à soi, chacun est convié à reconnaitre le corps qu’il a pour s’avancer peu à peu vers le corps qu’il est. (Lise Sirois)
Un moment privilégié d’éveil sensoriel pour explorer dans la détente son corps, ses limites, ses possibilités, ses capacités… Et pour redécouvrir ses structures fondamentales : centre, verticalité, axes avec une attention toute particulière à la respiration.